AvideceWopyBalab

Comme à son habitude, la Bundesliga a vu le Bayern Munich être sacré champion, devant des concurrents séduisants mais manquants de continuité. Le championnat allemand est spectaculaire, se renouvelle, mais à la fin, c’est toujours le Rekordmeister qui gagne.

Des concurrents irréguliers

On pourrait faire un copié/collé des saisons précédentes pour présenter le titre du Bayern Munich, mais ce serait mentir. Le champion en titre vivait une saison de transition, et était plus prenable que jamais. Entre les départs non compensés (sans faire injure à Coutinho et Perisic) de Robben et Ribéry, et le mauvais début de saison qui a conduit le club à se séparer de son entraîneur, les Bavarois n’étaient pas programmés pour finir encore devant tout le monde. Pire encore, à la 15e journée, ils n’étaient que 5e du classement avec 6 points de retard sur le leader. Devant eux, outre Leipzig, il y avait Gladbach, Dortmund, et même… Schalke, qui finira 12e. Cela en dit long sur les prétendants au haut du classement allemand (auquel on peut ajouter le Bayer Leverkusen) : aucun n’est capable de maintenir toute une saison de bons résultats. Tous commettent régulièrement des faux-pas, et peuvent perdre de précieux points sur chaque pelouse. Cela participe évidemment au charme de ce sport, cela rend fou les parieurs, et cela fait les affaires de la seule machine du championnat : le Bayern.

Le bon Flick

Depuis le départ de Kovac, on a vu un tout autre Bayern. Flick a ressuscité des cadres qu’on croyait incapables de retrouver un si haut niveau, comme Boateng ou bien sûr Müller, plus grand symbole de cette adhésion du vestiaire. La fusée Davies, le métronome Kimmich, et le bombardier Lewandowski, entre autres, ont assuré une implacable impression de puissance, voire d’invulnérabilité. Avec 13 points d’avance sur son dauphin, le meilleur buteur, le meilleur passeur, la meilleure attaque et la meilleure défense, qui peut contester le titre de cette formation ? Surtout, avec son insatiable désir d’attaquer, le Bayern a parfois eu des allures de rouleau-compresseur que les concurrents ne peuvent que subir. L’éclatante victoire face à Dortmund au match aller l’illustre. Côté français, outre Coman, et malgré un Tolisso en fin de cycle, on peut se réjouir de la bonne saison de Pavard, peut-être parti pour s’installer dans la durée.

Du jeu toujours vers l’avant

Outre ces résultats bruts, on a surtout apprécié la saison allemande pour le spectacle garanti sur chaque pelouse. La philosophie qui règne dans ce championnat, à quelques exceptions près, semble être très claire : plus on attaque, plus on a de chances de marquer, et donc de gagner. Là où certaines formations d’autres championnats prennent le temps de se mettre en place pour ne pas être en danger en cas de perte de balle, la Bundesliga est devenu le royaume de la transition rapide. De fait, il n’est pas étonnant de voir que les équipes fassent confiance à des jeunes, aux jambes plus rapides et endurantes que certains vieux briscards. Les quelques espoirs offensifs français que sont Nkunku, Diaby ou Thuram s’éclatent comme ils n’auraient sans doute pas pu le faire ailleurs, tout du moins pas dans de telles proportions. Ce goût assumé pour l’attaque a sans doute conduit Sancho à signer il y a quelques années, ou Haaland de l’imiter cet hiver. L’Allemagne n’offre pas les salaires qui leur permettent d’aligner des équipes de stars mondiales (hors Bayern), mais c’est devenu un championnat forcément attractif pour qui souhaite s’exprimer librement.

Le meilleur joueur : les 2 font la paire

Impossible de les départager. Comme en 2016, Lewandowski et Müller méritent d’être récompensés. Sauf que contrairement au Polonais, machine implacable chaque saison, l’Allemand n’avait plus atteint ce niveau depuis. Auteur de 21 passes décisives, il est LA plus grande réussite de Flick, plus encore que Davies en arrière-gauche. Le Raumdeuter a retrouvé des jambes à mettre au service de sa science du jeu, et son association avec Lewa a refait des étincelles. Pour le Polonais, inutile d’argumenter longtemps : meilleur joueur du championnat au niveau intrinsèque, il assume son statut chaque journée depuis des années.

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Le coup de cœur : Sabitzer, bon à tout faire

En tant que sympathisant de Manchester United, je prie pour qu’il rejoigne le club tant il serait, parmi les cibles réalistes, LE joueur qui pourrait amener la plus grosse plus-value à l’équipe. Si Nagelsmann a donné un côté encore plus spectaculaire à Leipzig, qui était pourtant déjà loin d’être une formation ennuyeuse, celui qui en a le plus profité est Sabitzer, bien que Nkunku et Werner soient d’autres réussites flagrantes. L’Autrichien, ailier replacé dans le cœur du jeu, n’a pas seulement battu son record de buts personnels en une saison de Bundesliga. Il a surtout appris un rôle de milieu dans un double pivot (souvent avec Kampl) où il fallait que le jeu passe par lui : en transition, en phase de pressing, ou pour orienter sur le côté. Aujourd’hui, il est devenu encore plus complet, et semble être un joueur qui s’adapte rapidement à toute situation, sans jamais se plaindre… tout en augmentant chaque saison son niveau.

Le meilleur gardien : Sommer taille patron

C’est vrai que Neuer et Gulácsi ont aussi réalisé une belle saison, mais Sommer a vraiment été excellent. Le Suisse, même s’il a flanché face au Bayern Munich avec une invraisemblable boulette, a souvent rassuré Gladbach, qualifié pour la prochaine Ligue des champions. Tonique, il rayonne sur une zone étendue jusqu’à l’extérieur de sa surface de réparation, permettant à son équipe de jouer haut sans craindre trop de dégâts, à l’inverse de certains grands gardiens qui n’ont su briller « que » sur leur ligne. Bon balle aux pieds, agile, avec une main toujours ferme, il semble atteindre sa plénitude cette saison, même s’il ne sort évidemment pas de nulle part.

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Le joueur qui a le plus progressé : Serdar, rare éclaircie

Le MIP (most improved player) de Bundesliga est donc Serdar. S’il a subi une baisse de régime lors de l’interminable crise de résultats de Schalke, il n’a jamais démérité en termes de combativité. Meilleur buteur du club malgré une position de milieu relayeur, il est la seule éclaircie dans le ciel de Gelsenkirchen, en compagnie de Harit, qui avait débuté le championnat de manière incandescente. Plus à l’aise dans un milieu à 3 ou en losange, en tant qu’équivalent à gauche de Caligiuri, il a l’endurance nécessaire pour faire les aller-retours et ainsi se projeter puis revenir défendre avec aplomb. Son épanouissement passe par un système où ses montées sont mises en valeur : ce serait dommage de se passer pour son appétit offensif.

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La révélation : la fusée canadienne

Pris dans son dos, il accuse 5 bons mètres de retard. L’attaquant adverse n’arrivera pourtant pas le premier sur le ballon, puisque Davies, aux jambes surpuissantes, l’aura devancé. Cette scène, presque irréelle entre joueurs professionnels, peut avoir lieu si un adulte joue face à des enfants. En Allemagne, c’est pourtant le bambin qui ridiculise les autres. Bombe offensive, le Canadien sait déjà monter à bon escient et dédoubler au bon moment. Ses quelques erreurs de placement défensifs sont compensés par son physique dominant. Restera-t-il arrière-gauche, ou redeviendra-t-il ailier ? Qu’importe, puisqu’il nous laissera bouche-bée dans tous les cas. En termes d’impression visuelle de vitesse pure, et sans faire injure à beaucoup de joueurs rapides, je ne crois pas avoir vu ça depuis le Bale de Tottenham.

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La recrue : Brandt, construit pour durer

Il a fallu de gros efforts à Favre pour comprendre qu’on ne laissait pas une telle pépite sur le banc. Qu’importe l’importance de Reus, l’affection pour Hazard, ou les dribbles de Sancho, c’est une insulte au football que de se passer de Brandt. Après plusieurs mois, le Suisse a finalement aligné tout le monde dans un 3-4-3 où Brandt est le « sacrifié » parmi les offensifs, puisqu’il est titulaire dans le double pivot au milieu, et donc plus loin des buts. Sans jamais se plaindre, l’Allemand a réalisé de merveilleuses performances, comme ce récital face à Leipzig au match aller, malheureusement entaché d’une erreur qui coûte un but. Lors de ce match, le numéro 19 a montré une intelligence de jeu qui fait qu’il peut être utilisé partout, contrairement à ses camarades offensifs. Quel dommage qu’il soit ainsi sacrifié, puisqu’on a vu notamment face à Schalke, lors de la reprise post-confinement, qu’il restait délicieux plus proche des buts. Mais en bonne recrue parfaite, il ne se plaint jamais et fait le boulot.

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Le flop : le Werder a eu chaud

Barragiste, le Werder a été plus proche que jamais de la relégation. Même s’il venait à se sauver, le club de Brême peut maudire cette saison, qui a été difficile. Le départ de Max Kruse a fait beaucoup trop de mal au secteur offensif, qui n’avait plus de joueur référence. On ne remplace pas aussi facilement son capitaine, qui avait déjà tant prouvé en Bundesliga aussi bien au Werder qu’à Gladbach. Malgré un Rashica épatant (qu’on aurait mis en révélation de l’année sans le monstre Davies), les pensionnaires du Weserstadion n’ont réussi à gagner 2 matches de suite… qu’une fois cette saison, lors des 3e et 4e journées. Cela en dit long sur leur manque de constance, alors que certaines individualités comme Pavlenka, Eggestein, Klaassen et Osako sont intéressantes. Comble du mauvais goût : malgré la large victoire face à Cologne lors de la dernière journée, le coach n’a pas jugé bon de faire entrer le vétéran Pizarro pour une dernière danse en première division. Et ça, c’est moche.

Par rapport à ce qu’il pouvait (et devait) apporter, on aurait pu citer Bas Dost à Francfort. Mais ça reste moins pire que le Werder.

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L’équipe-type

Sommer – Trimmel, Bornauw, Upamecano, Davies – Sabitzer, Kimmich – Sancho, Müller, Werner – Lewandowski

Dans ce 4-2-3-1, les présences de Sommer, Davies, Sabitzer, Müller et Lewandowski s’expliquent facilement, puisqu’on en a parlé lors des distinctions personnelles. La présence de Trimmel peut surprendre, mais dans une équipe défensive, ses centres ont souvent fait la différence. Bornauw ne mérite sans doute pas autant qu’Alaba par exemple, mais son assurance pour son jeune âge, ainsi que sa faculté à être décisif, font qu’il est difficile de ne pas tomber sous le charme. Pour Kimmich, Sancho et Werner, inutile de donner plus d’explications.

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Cela n’enlève rien aux belles saisons de Neuer, Gulácsi, Hakimi, Alaba, Zakaria, Brandt, Thiago Alcantara, Serdar, Havertz, Harit, Kostic, Nkunku, Diaby, Pléa, Thuram, Rashica, Gnabry, Haaland ou Weghorst. La Bulli est belle à suivre grâce à eux, aux autres joueurs, aux entraîneurs, mais aussi à son public (en temps normal). Merci à eux !