AvideceWopyBalab

Inconnu en France, Rommel Fernandez était footballeur professionnel dans le début des années 90. Véritable star dans son pays, le Panama, il était plus connu que Francisco Rodriguez, le président local. Avec sa petite moustache comme signe distinctif, il arpentait les surfaces de réparation tel un vautour, et à la moindre occasion, il allait placer son coup de tête dévastateur. Il avait le don de toucher en plein cœur les supporteurs. Véritable icône à la Drazen Petrovic, il disparut aussi tragiquement que ce dernier, en pleine fleur de l’âge.

Rommel avait 23 ans quand il débarqua en 1989, en Europe, dans les rangs du club espagnol du CD Tenerife. Il fut recruté suite à un tournoi organisé par le club canarien. Il regroupait des joueurs d’ascendance espagnole et se nommait « Mundialito de la Emigracion » : « Le petit mondial de l’émigration ». Il se fit remarquer par ses nombreux buts et surtout ceux inscrits de la tête. On le surnomma le « Panzer ». Tenerife lui offrit un contrat dans la foulée pour jouer avec l’équipe réserve.

Le club était alors plutôt dans une mauvaise période, il végétait entre la Segunda A et la Segunda B. Par manque de talent en attaque, il obtint alors très vite sa chance avec l’équipe première et ne la lâcha plus pendant deux ans où Il marqua 47 buts dont un bon nombre de la tête. La légende raconte qu’il en aurait même mis de plus de 30 mètres.

rommel

Grace à son efficacité et une équipe de guerriers soutenue par un public reconquis, Tenerife redevint une équipe de première division. Il fut le détonateur qui précipita le club dans la meilleure période de son histoire, à savoir les années 90.

Ses deux saisons réussies lui ouvrirent les portes du grand Valence avec un transfert avoisinant les 300 millions de pesetas. Par manque de chance et sans trop jouer, il marqua peu de buts pour le club valencian. Il fut alors prêté en 1992 à Albacete, où il récupéra son meilleur niveau, avec 7 réalisations en 14 matchs.

A cette époque, il était la star de la sélection panaméenne durant les qualifications pour la coupe du monde 1994 aux USA. Mais tout s’arrêta brutalement un jour de mai 1993.

rommel (1)Il revenait au volant de sa voiture, d’un repas organisé avec ses coéquipiers. Il faisait beau, et sur une ligne droite, sa voiture sortit de la route pour aller s’encastrer dans un arbre. Rommel mourut dans l’accident, sa Toyota Celica était brisée en plusieurs morceaux signe de la puissance du choc. La raison reste encore inconnue…

Dès lors, il inscrit son nom sur la liste des légendes parties trop tôt. En conséquence et hommage, on donne son nom au stade national de Panama City. Une statue est érigée à l’endroit de l’accident à Albacete, et même aujourd’hui, des fans y déposent encore des fleurs. Une mosaïque est faite au dos d’une tribune du stade Heliodoro Rodriguez Lopez, où les supporters de Tenerife viennent se recueillir.

Rommel ne parlait pas beaucoup par peur des moqueries

On pourrait se dire que cette fin tragique est la raison de tous ces honneurs posthumes. Mais en creusant, on se rend compte que si le public l’aimait autant c’est qu’il avait un parcours bien atypique. Rommel était issu d’une famille pauvre d’un quartier pauvre de Panama City. Il savait à peine lire et écrire. Du fait d’un physique robuste, 1m85 pour 81 kg, il fut recruté à l’âge de 15 ans par l’Atlético Panama pour jouer en professionnel puis dans le meilleur club du pays à l’Alianza FC.

1583451_origArrivé à Tenerife, il ne parlait pas beaucoup par peur de moqueries, mais s’exprimait surtout sur le terrain en effectuant un travail de sape sur les défenses adverses. Mais aussi en dehors, où il écumait jusqu’à tôt le matin, les bars à salsa de la ville de Santa Cruz. Gentil, timide, bosseur, guerrier, modeste, tant de synonymes qui ressortent et qui le caractérisent. C’était l’anti star par excellence et son niveau social lui fit devenir le contraire. Sa vie avait mal commencé et comme un pied de nez, elle s’acheva tout aussi tragiquement. Les fans de Tenerife, d’Albacete, du Panama, de la Liga, et du football ont perdu ce 6 mai 1993, plus qu’un joueur, un ami tout simplement.

La conclusion de cet article reviendra à l’ancien Parisien Julio Cesar Dely Valdés qui prononça lors d’une récente interview :« Au Panama, Rommel est un synonyme de football ». Tout est dit.

Leave a Reply