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Deuxième volet de notre rubrique tactique, où nous allons essayer de voir comment pourrait évoluer le Real Madrid dans le futur. Entre l’adaptation d’Hazard, le retour de prêt d’Odegaard, et les départs de plusieurs cadres, la Maison Blanche pourrait afficher un tout autre visage. Evidemment, on reste dans la théorie, et on n’a pas la prétention de donner des leçons à un entraîneur qui a déjà gagné la Ligue des champions à 3 reprises.

L’axe des mâles alpha

Ces dernières années, le Real Madrid a pour force principale la solidité de son axe défensif, symbolisé avant tout par 2 joueurs dominants : Sergio Ramos et Casemiro. L’Espagnol n’est pas qu’une machine à marquer des buts décisifs. Il est aussi un formidable repère défensif. Son autorité et ses interventions rapides et musclées soulagent ses partenaires. Le Brésilien, en l’espace de quelques saisons, est passé du statut de joueur de rotation à celui de joueur-clé dans la récupération. Aujourd’hui milieu défensif complet, son volume de jeu et sa bonne lecture lui permettent de couvrir ses partenaires du milieu qui partent au pressing, tel un bouclier de la défense.

La présence de ces 2 joueurs a longtemps permis au Real Madrid d’aligner 2 latéraux offensifs (Carvajal et Marcelo), 2 milieux créateurs (Kroos et Modric) et un trio d’attaque pas réputé pour sa faculté et sa volonté à faire du contre-pressing. Autrement dit, et même si d’autres joueurs comme Varane ont aussi un rôle important, tout le monde ne défendait pas à fond au Real Madrid, certains se contentaient du minimum, mais l’équilibre était assuré dans ce 4-3-3. Le déclin physique de Modric, qui a perdu en intensité malgré un bon retour post-confinement, et la baisse de volume de jeu inexplicable (lassitude après avoir tout gagné ?) de Kroos ces derniers mois ont conduit Zidane à miser sur Valverde, moins talentueux mais nettement plus généreux dans l’effort. Le Français devrait conserver ce système qui a fait ses preuves, à raison, dans la mesure où il dispose d’un effectif qui y correspond bien.

Si les attaquants ne sont pas des monstres de pressing ou de contre-pressing, le Real n’est pas pour autant une équipe faite pour jouer en bloc bas. L’époque d’Ancelotti est révolue, et des joueurs parfaits en transition comme Di Maria, Ronaldo ou Bale (même s’il est encore présent dans l’effectif) ne sont plus là pour profiter du travail des milieux (avec Kroos dans le rôle d’Alonso au lancement) ou de Benzema, et mener des contre-attaques sur 60 mètres. Autrement dit, jouer en contre-attaque, si c’est pour lancer Vazquez ou Vinicius, ressemble à une opération stérile. L’effectif madrilène est taillé pour jouer en bloc médian, avec une formation sans ballon en 4-1-4-1 où les ailiers redescendent d’un cran pour aider les milieux, et où Benzema coupe une ligne de passe au premier relanceur adverse, voire presse s’il sent de la fébrilité dans les pieds du défenseur. Dans ce cas précis, les relayeurs le suivent au pressing pour inciter l’équipe adverse à se précipiter et à balancer.

Lorsque le Real est à la relance, Varane et Ramos sont évidemment à l’aise balle aux pieds pour fixer l’adversaire et trouver un milieu dans une zone où il aura le temps de se retourner, et de distribuer le jeu. Loin d’être un simple destructeur, Casemiro est une option de relance, même si le jeu s’éclaire lorsqu’il passe par Kroos, à condition que l’Allemand soit en bonne condition physique. Les deux joueurs alternent en pointe basse en phase de relance, l’autre prenant alors la position de relayeur gauche. Ils poussent parfois le vice en s’intercalant entre les 2 centraux, poussant les latéraux à monter encore plus. De son côté, Valverde a un rôle de projection (presque un rôle de milieu intérieur droit) balle aux pieds ou dans ses appels. L’Uruguayen, par son profil unique dans l’effectif, apporte une arme importante à son équipe, où il manquait jusque-là de joueurs de pénétration dans l’entrejeu. Avec un point d’appui de la qualité de Benzema, à la fois 9 et 10, il a de quoi se régaler. A défaut de pouvoir percer dans l’axe, les milieux peuvent écarter le jeu sur un latéral qui monte, ou directement sur un ailier.

Prendre le large

Cette saison, le second meilleur buteur du club n’est autre que… Sergio Ramos. Même si les statistiques n’expliquent pas toujours tout, celle-ci illustre parfaitement la faillite des ailiers : Asensio, Bale et Hazard ont vécu une année pourrie par les blessures, Vinicius fait rarement les bons choix dans le dernier geste, Vazquez est un ailier centreur et pas un joueur capable de marquer régulièrement, tandis que Rodrygo est encore tendre. Zizou a été forcé à jouer la majorité de la saison en entourant Benzema de Vazquez et Vinicius, là où Asensio, Bale et Hazard auraient dû jouer un rôle-clé, et soulager le Français en ce qui concerne le but.

Avec Asensio et Hazard en forme, pour cette fin de saison et surtout la prochaine, Benzema aura 2 compagnons d’attaque avec qui combiner, capables de prendre la profondeur lorsqu’il décroche, et de rentrer à l’intérieur. L’Espagnol et le Belge ont une variété dans leur jeu nettement supérieure à celle de Vazquez et Vinicius, globalement limités. Leur apport permettra au Real d’écarter, de percuter du couloir vers l’axe, et de proposer une seconde solution dans la surface quand le centre vient côté opposé, comme on l’a déjà vu sur le but d’Asensio, pour son retour face à Valence. Avec un Benzema mobile et amoureux des une-deux, les 2 joueurs pourront s’amuser dans des demi-espaces bien trop souvent délaissés cette saison, où on avait l’impression que le Real jouait en forme de U entre les milieux et les ailiers. Aider Benzema à l’intérieur du jeu sera un axe d’amélioration majeur de l’animation offensive.

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Si le rôle des ailiers à l’intérieur est important, cela implique une forte implication offensive des latéraux pour écarter le jeu face aux blocs bas, ou même lors de transitions. Mendy a prouvé qu’il pouvait occuper le couloir avec autorité, bien aidé par sa vitesse hors norme. De l’autre côté, Hakimi occupe un rôle de piston cette saison à Dortmund, où il apporte beaucoup offensivement, au point d’attiser les convoitises de beaucoup de grands clubs européens. Reguilon réalise une super saison à Séville qui aime jouer sur les ailes, tandis que Carvajal, bien qu’en perte de vitesse, excelle dans les centres. Si ces 4 latéraux ont les qualités pour briller dans ce rôle exigeant que l’organisation leur demande, ce sera à Zidane et à son staff de les faire souffler suffisamment chacun, tant ce rôle sera épuisant à chaque match. Le fait de disposer de 4 joueurs de ce niveau prend alors tout son sens.

Les soirées d’Isco

S’il est absent de l’équipe-type théorique, mais aussi de celle des remplaçants, il n’est nullement question de se séparer d’Isco. Outre son niveau de jeu, qui lui permet de faire la différence à tout moment, l’Espagnol est LE joker de Zidane quand il s’agit de faire preuve de flexibilité tactique. Ces dernières années, pour trancher avec son 4-3-3 et lui donner des allures de 4-4-2 losange, l’entraîneur merengue l’a souvent utilisé. Certes, c’est un joueur parfois agaçant, avec une proportion frustrante à trop garder la balle et à ralentir le jeu. Mais sa capacité à casser les lignes par la passe ou le dribble, sa bonne conservation de balle et surtout son intelligence lorsqu’il s’agit de se balader entre le milieu et la défense adverse le rendent très important pour son équipe. Aussi, contrairement à James, sa présence apporte une touche dont Zidane aime se servir lors de grands rendez-vous, notamment en Ligue des champions.

Comment améliorer l’effectif ?

Personne ne pourra jamais leur enlever le rôle important qu’ils ont joué lors des dernières conquêtes européennes du Real Madrid. Néanmoins, Marcelo et Bale semblent en fin de cycle au sein de la Maison Blanche : ils ne sont pas finis, mais ne représentent plus l’avenir. Le Brésilien perd peu à peu sa place, et mérite de trouver un club où il sera de nouveau l’option prioritaire. Il a clairement le talent et les jambes pour rebondir. Le Gallois est handicapé par des blessures à répétition qui l’empêchent de redevenir le formidable joueur qu’il pourrait encore être. Son niveau de jeu actuel est très en-dessous de ce qu’il doit apporter. Avec un peu moins de regrets, James pourrait aussi quitter le navire : son talent n’est pas remis en cause, mais il ne semble pas assez impliqué. Odriozola ne devrait pas faire de vieux os non plus, barré par Carvajal et Hakimi. Mieux considéré à Arsenal, même s’il n’est pas indiscutable à Londres, Ceballos a tout intérêt à ne pas revenir. Enfin, malgré un but miraculeux face au FC Barcelone, Mariano devrait logiquement trouver du temps de jeu ailleurs. Son retour au club reste une énigme aujourd’hui encore.

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Les statuts de James et de Bale, peu en adéquation avec leurs performances cette saison, les rend difficiles à faire partir. Ils jouissent d’un salaire astronomique, et ne retrouveront sans doute pas les mêmes conditions ailleurs. C’est au club de leur faire comprendre que leur intérêt réside dans un départ, afin de prendre une nouvelle impulsion sportive. La meilleure solution serait de ne pas se montrer gourmand en termes d’indemnités de transfert, la seule économie sur leurs salaires représentant déjà une bonne chose.

Dans sa politique de « privatiser » le futur du ballon rond, le Real a encore trop de joueurs tendres qu’il convient de prêter, afin qu’ils reviennent plus tard par la grande porte, comme Hakimi ou Odegaard devraient le faire à la fin de la saison. On pense notamment à Brahim, Kubo, Reinier et Rodrygo, même si ce dernier a montré de belles choses, notamment avec son triplé en Ligue des champions. Dans la mesure où je vois mal un club se positionner sur lui, Vazquez peut encore faire le boulot à droite, lui qui est le seul véritable centreur parmi les ailiers. Concernant ces jeunes, l’avenir leur appartient, à condition de prouver ailleurs qu’ils ont ce qu’il faut pour s’imposer à Madrid par la suite.

Dans la mesure où Areola ne restera pas, une nouvelle doublure pour Courtois est recherchée. Le Belge a encore de belles années devant lui, aussi faut-il trouver un gardien qui accepte d’être remplaçant, avec peu de chances de passer numéro 1. On pense à Hitz, qui dispose déjà de ce statut à Dortmund, alors qu’il est un formidable gardien, agile et spectaculaire… et meilleur que Bürki pour beaucoup d’observateurs, moi le premier. Rulli, qui ne sera pas conservé par Montpellier, pourrait être une autre belle alternative. Mis à la porte par Schalke, incapable de s’imposer à Norwich, Fährmann pourrait également être intéressé. En perte totale de confiance depuis l’éclosion de Nübel, l’Allemand a démontré par le passé qu’il pouvait atteindre un très bon niveau, et cela suffirait largement pour un rôle de doublure, à condition d’être en confiance.

La recrue la plus importante sera peut-être au milieu, qui repose énormément sur les capacités de Casemiro… qui n’a pourtant AUCUN remplaçant. Avec des latéraux qui aiment autant monter (surtout si Hakimi devient titulaire), et un Kroos qui a quand même beaucoup perdu en volume de jeu ces 2 dernières années, malgré un bon retour post-confinement, une absence du Brésilien serait terrible. Cette équipe a besoin d’un autre milieu défensif qui couvre beaucoup de terrain, s’impose physiquement, et idéalement ne se cache pas pour proposer aux défenseurs centraux une solution à la relance. Sur l’aspect sans ballon, Ndidi ressemble à la recrue idéale. Sur l’aspect avec ballon, on opterait plutôt pour un Tonali.

Pour combiner les 2 aspects, on se dirigera plutôt vers Zakaria. Le milieu de Gladbach, qui a pris une nouvelle dimension cette saison, excelle à la récupération. Sur le plan de la relance, il adore se proposer, et choisit toujours calmement l’option de passe qui fera avancer l’équipe. En pointe basse d’un milieu à 3 ou en double pivot, son abattage sans ballon est exemplaire, et sa vitesse lui permet des retours défensifs salutaires. Reste à savoir s’il acceptera d’être un élément de rotation, avec de grandes chances que le titulaire du poste pour les grosses affiches reste Casemiro, indéboulonnable. L’importance du Brésilien éloigne d’emblée des pistes comme Rodri ou Thomas Partey, qui n’accepteront jamais d’être des doublures, malgré un profil qui se marierait bien avec le projet de jeu. Certaines voix en Espagne parlent de Roca, mais j’avoue ne pas l’avoir vu jouer avec l’Espanyol. Javi Martinez, à qui il ne reste plus qu’un an de contrat, n’est pas une option sur le long terme, mais il pourrait dépanner. Enfin, je trouverais dommage que Camavinga y aille pour ça, puisqu’il a encore besoin de confirmer, à Rennes si possible, en tant que titulaire. Si le Real le recrutait pour le prêter ensuite, cela prendrait plus de sens, mais ça ne changerait rien à la donne pour la saison prochaine.

Dans un rôle de relayeur, Pogba et van de Beek sont régulièrement cités. Avec Kroos, Valverde, Odegaard, Modric et Isco, le club est pourtant déjà bien pourvu dans ce secteur. Même si ce sont 2 joueurs capables d’atteindre un niveau de jeu forcément intéressant pour tout club, cela ne serait pas très pertinent, à moins qu’il n’y ait une vague de départs. Modric pourrait être amené à partir, même si je pense qu’il peut encore rendre service, puisqu’Odegaard peut apprendre à ses côtés. Il n’est pas impossible que le Norvégien souhaite rester une saison de plus à la Real Sociedad, si jamais l’horizon lui semble bouché… ce qui serait bien dommage, puisqu’il a tout pour s’imposer progressivement. Dans ce cas précis, la venue du Français ou du Néerlandais serait évidemment une bonne chose. Sans remettre en cause l’apport d’un Pogba, van de Beek, roi de l’utilisation des espaces, pourrait apporter une facette inédite à l’armada merengue, à condition que ses partenaires arrivent à lire son jeu. Quoi qu’il en soit, Zidane ne devrait pas manquer de munitions pour modeler son équipe à l’image du coach qu’il est : précis et efficace.

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