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Aujourd’hui, Maxime David, supporter du FC Nantes et rédacteur en chef pour Wallabet.fr vous propose de prendre la direction de l’ouest de la France pour vous parler du derby qui opposera samedi prochain le FC Nantes au Stade Rennais FC. Cette rivalité est-elle historique ou récente ? Les supporters tiennent-ils plus à cette rencontre que les joueurs ? Est-il possible de supporter les deux clubs à la fois ?

Quel que soit le pays dans lequel vous vous trouvez, vous avez forcément entendu parler des derbys. La plupart sont d’ordre géographique entre deux équipes situées dans la même zone, ou entre une « ville centre » et une « ville périphérique » (Lille/Lens, Lyon/Saint-Étienne, Metz/Nancy…).

Les chaînes de télévision ont également créé des derbys de toutes pièces dans le but d’attirer toujours plus de spectacteurs sur leur antenne (tel l’Olympico entre l’OL et l’OM…). Le site Moustache Football Club a réalisé une cartographie des derbys en France qui vous permettra d’y voir un peu plus clair.

Une guéguerre assez récente

Si 43 ans séparent la création des deux clubs, les deux clubs ne se sont que peu côtoyés au début de leur histoire : le Stade Rennais était déjà en D1 quand a été créé le FC Nantes. Ce dernier a rejoint l’élite en 1963 pour ne le quitter qu’en 2009. Pendant cette période, le club rennais a souvent réalisé l’ascenseur entre D1 et D2 pour ne s’y stabiliser qu’à l’aube de la saison 1994/1995. Depuis le milieu des années 2000, ce sont les Nantais qui firent deux passages à l’étage inférieur.  La donne a changé sur le plan sportif avec le SRFC qui flirte avec les places européennes depuis maintenant plusieurs saisons.

Ce qu’il faut se dire, c’est que durant la période « creuse » du Stade Rennais où il alternait D1 et D2, le FC Nantes a eu le temps de se créer une autre rivalité, non pas géographique mais plutôt sportive avec les verts de l’AS Saint-Étienne. Entre 1964 et 1983, 15 des 20 titres de champion de France ont été décernés à l’un des deux clubs.

Et pourtant, les équipes nantaises et rennaises étaient anciennement basées sur des relations fraternelles, allant jusqu’à déployer une banderole « Rennes la coupe, Nantes le championnat » en 1965. Mais entre 1974 et 1993, Rennes enchaine les descentes en Ligue 2, alors que Nantes connait beaucoup de succès. C’est à ce moment-là, qu’une jalousie est née entre les deux clubs.

L’an passé, le Stade Rennais a récompensé ses joueurs d’une prime de 36 000€ pour avoir remporté le (fictif) championnat de Bretagne composé donc de Rennes, Guingamp, Lorient et… Nantes

Il existe une véritable question d’appartenance ou non à la Bretagne lors de ce derby. Si la ville de Nantes a été une capitale historique de la Bretagne, c’est aujourd’hui Rennes qui est la capitale administrative de la région. Les discussions sur l’appartenance actuelle de la cité des ducs à la Bretagne alimentent de nombreux débats à la fois dans les bars mais aussi dans les tribunes des stades respectifs.

À défaut d’avoir autant de titres nationaux que son homologue nantais, le Stade Rennais a récompensé ses joueurs l’an passé d’une prime de 36 000€ pour avoir remporté le (fictif) championnat de Bretagne composé donc de Rennes, Guingamp, Lorient et… Nantes. Les rouge et noir tendent donc à inclure les canaris en Bretagne.

Supporter les deux clubs : est-ce possible ?

Cette question revient pour tous les derbys : est-il possible de supporter à la fois Lille et Lens ? Lyon et Saint-Étienne ? Metz et Nancy ?

Pour celui de l’Ouest opposant Rennais et Nantais, une tendance se dégage : la rivalité semble être devenue aujourd’hui plus importante en tribunes que sur le terrain. Joueur du FC Nantes entre 2001 et 2006, Olivier Quint raconte qu’à l’époque, sur le terrain, c’était un match très important : « Contre Rennes, c’était un vrai derby. On le sentait bien en tant que joueur. Y avait pas besoin de le dire. Si vous parlez à Frédéric Da Rocha d’un Nantes-Rennes, il vous dira que c’est vraiment le match à ne pas perdre. »

Depuis, le club ligérien a multiplié les recrutements foireux et a fait à deux reprises l’ascenseur entre Ligue 1 et Ligue 2. Si le club semble stabilisé dans l’élite du football français depuis sa remontée en 2013/2014, les affrontements avec le voisin rennais semblent avoir perdu de leur intensité sur le terrain comme l’expliquait l’ancien canari Lucas Deaux : « C’est ce côté folklorique qui est sympa parce que sinon, pour les joueurs, ça reste un match normal puisque peu d‘entre nous sont Nantais ou Rennais, ça fausse un peu la notion de derby».

En tribune, le son de cloche est différent. Revenu avec réussite sur le devant de la scène depuis maintenant plusieurs années, la Tribune Loire (principal kop de supporters du FCN) dispute la suprématie régionale avec son homologue du SRFC le Roazhon Celtic Kop. Dimitri, porte-parole du RCK, ira même plus loin pour expliquer les relations entre les deux kops en affirmant : « on a l’impression que la BL a besoin  de nous pour exister ».

Pour illustrer la haine pouvant exister entre supporters, il faut se souvenir d’une date : le 19 mais 2007. Sachant leur club condamné à la seconde division, les supporters nantais, qui reçoivent Toulouse lors de la 38ème journée, envahissent le terrain à la 88ème minute alors que le score est de 0-0. Toulouse gagne donc sur « tapis vert », empoche trois points et double ainsi sur le fil le Stade Rennais, privant ce dernier de la troisième place directement qualificative pour l’UEFA. S’il n’est pas évident que le coup était calculé, les supporters rennais l’ont pris comme tel.

De retour en Ligue 1 en 2013/2014 après 5 saisons en Ligue 2 (entrecoupées d’une remontée éclair lors de la saison 2008/2009), les meilleurs ennemis sont malgré tout contents de se retrouver et n’hésitent pas à se chambrer sur les réseaux sociaux.

Derby Nantes / Rennes : je t'aime, moi non-plus
Derby Nantes / Rennes : je t'aime, moi non-plus

Lors de ce match un événement est venu mettre un peu plus d’huile sur le feu des relations entre les deux groupes de supporters. Des supporters nantais sont rentrés en pleine nuit dans le Roazhon Park (Stade de la route de Lorient à l’époque) pour dégrader le tifo géant prévu par le RCK depuis des mois. Les jaune et vert ont chambré leurs homologues rennais avant le match en tribunes mais aussi sur la toile. Tout ceci n’a fait que dégrader un peu plus l’histoire commune des deux kops.

https://twitter.com/AxeelBrd/status/384424437899997185?ref_src=twsrc%5Etfw

Une chanson a même été créée à cette occasion, et résonne désormais au Stade de la Beaujoire.

Les relations entre les deux kops ne sont pas au beau fixe. Pour tous ceux qui n’appartiennent pas à ces kops composés d’ultras, il est en revanche possible de supporter à la fois le FC Nantes et le Stade Rennais. Pour beaucoup, quand on est breton, on aime voir les clubs bretons gagner. Cela passe donc par Nantes, Rennes, mais aussi Lorient, Guingamp ou encore Brest.

Côté terrain, certains joueurs ont par ailleurs porté les deux tuniques lors de leur carrière. Parmi les plus récents on peut citer Christophe Leroux, Jocelyn Gourvennec, Olivier Monterrubio, Sylvain Wiltord, Ismaël Bangoura ou encore Sylvain Armand qui porte toujours aujourd’hui le maillot rouge et noir.

Symbole du respect mutuel qu’il existe entre anciens joueurs des deux camps, ils se retrouvrent tous les ans depuis maintenant plusieurs années à Blain pour une rencontre amicale.

Les profits de cette journée servent à soutenir l’association des paralysés de France à l’occasion de leur fête du sourire annuelle. Un beau geste réalisé par ces anciennes gloires qui rechaussent leurs crampons le temps d’un après-midi.

Alors : muscadet ou galette-saucisse ?

L’herbe est-elle toujours plus verte ailleurs ? Malgré une rivalité évidente en tribunes, les supporters peuvent-ils, en toute objectivité, envier leurs homologues sur certains points ?

Ils auront du mal à l’avouer, mais les supporters nantais envient aux rennais leur vitrine des trophées composée – s’il vous plait – d’une coupe des alliés en 1916, d’une coupe interfédérale de l’Ouest en 1919, de deux championnats de D2 (1956 & 1983) et de deux coupes de France (1965 & 1971). La coupe des alpes de 1982, les 8 titres de champion France et les 3 coupes de France remportées par les jaune et vert font pâle figure à côté.

Fraîchement rebaptisé Roazhon Park, l’ancien Stade de la route de Lorient avait un nom qui avait de quoi créer de la jalousie envers le peuple jaune et vert. Ce grand symbôle de fraternité qu’est de donner le nom d’une ville voisine à celui de son stade aurait pu inspirer les dirigeants du FCN à rebaptiser la Beaujoire en Stade de la route de Saint-Joseph-de-Porterie. Mais bon, la question ne se pose plus. Et heureusement.

Du côté des supporters rennais s’il y a bien un point qu’ils n’envient pas aux Nantais, c’est leur efficacité offensive. Avec leurs 100 buts inscrits sur les 3 dernières saisons de Ligue 1 – ce qui nous fait 0.87 par rencontre – les jaune et vert refusent de banaliser la joie procurée par un but. Les Parisiens font trembler très souvent les filets et leurs supporters sont devenus blasés et exigeants. À Nantes, on a plus de chances de réussir à se lécher le coude que de voir un but à la Beaujoire. Du coup quand on en voit un, c’est comme une petite victoire.