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La Ligue des Champions vient encore de nous offrir une soirée historique. Le Real Madrid, triple tenant du titre, a sombré face à des Ajaccides époustouflants qui ont renversé le résultat du match aller pour se qualifier en quarts de finale (4-1). La fin dâun cycle.
Une nouvelle « remontada »
Le soir du 13 février, en sortant de lâAmsterdam Arena, on pouvait se dire que lâAjax était maudite, après un match qui lâavait vu dominer, espérer et finalement sâincliner avec 3 fois plus de tirs, un poteau touché et un but refusé. 3 semaines plus tard, en sortant du stade Santiago Bernabeu, on peut se dire que lâAjax est magique. Pendant dix minutes, pourtant, on a cru se reproduire la recette madrilène de ces dernières années, cette leçon de « Real-isme » qui phagocyta le football européen depuis 2014. Seul au second poteau, Raphaël Varane a fait vibrer la barre dâOnana sur une tête à lâangle des six mètres (4e).
Séance de récupération des joueurs du Real Madrid pic.twitter.com/366n7XEThj
— David Arrieta (@arrietadavid1) March 6, 2019
Et puis il y a eu cette contre-attaque conclue par Hakim Ziyech qui venait célébrer son but devant le « Mur Blanc ». Au quart dâheure de jeu, 5 minutes après avoir effacé Carvajal dâun dribble venu dâailleurs, le jeune David Neres était à la réception dâune passe de Tadic et, sous le regard impuissant de Modric, inscrivait un second but plein dâaudace. LâAjax avait refait son retard. Ce nâétait là que le début dâun long calvaire pour les hommes de Santiago Solari qui, en plus de son cauchemar au milieu de terrain, perdait consécutivement Lucas Vasquez et Vinicius sur blessure. Après les échecs successifs des deux buteurs devant la cage vide (22ème) puis face à Courtois (33ème), le Real pouvait même sâestimer heureux de regagner les vestiaires avec un retard de deux buts.
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La seconde période démarrait comme la première, les joueurs en Blanc entamant le siège dâune défense néerlandaise combative à défaut dâêtre rassurante. Benzema, par deux fois, était tout proche de sonner la révolte. A lâheure de jeu, lâattaquant français choisit lâoption individuelle mais sa frappe fuit le cadre. Lâaction suivante est un régal : tacle soyeux de Mazraoui, transversale de Ziyech, remise instantanée de Van De Beek et, pour finir, cette frappe sèche de Dusan Tadic qui trouve la lucarne gauche de la cage Malgré lâintervention de la VAR pour une touche litigieuse au début de lâaction, M. Brich accorde le but. 3-0. Asensio croit bien sonner la révolte dâun joli poteau rentrant (70e), mais câest bien lâAjax qui aura le dernier mot. A lâimage de Thibault Courtois, mystifié du haut de son mètre 94 sur le coup-franc de Schöne, le Real nâaura finalement jamais pu y croire pendant tout le match.
Le Real perd sa couronne
Madrid ne pouvait pas tomber plus bas. Après deux défaites cuisantes à domicile face au Barça (0-3, 0-1) qui ont anéanti tout espoir de titre national, câest une nouvelle déconvenue face à une équipe inexpérimentée que personne ne voyait se qualifier après le résultat du match aller. Sâil y a quelquâun à incriminer, câest bien le coach madrilène, Santiago Solari. Force est de constater que lâancien joueur de la Maison Blanche (2000-2005) nâa pas su transcender ses joueurs comme lâavait fait Zidane dans une situation similaire la saison dernière. Pire, il a conforté certains dans un complexe de supériorité : selon plusieurs sources, câest lui qui aurait encouragé sergio ramos à concéder un carton jaune en vue de le préserver pour les quarts de finaleâ¦
ð jose mourinho :"Demandez à tous les joueurs du monde : accepteriez-vous de remporter la ligue des champions trois fois de suite et de sortir en huitième la quatrième année ? La réponse sera OUI sans aucun doute." pic.twitter.com/l11KX2AViB
— Real Madrid ð«ð· (@RMadridFrance_) March 6, 2019
Plus généralement, câest tout une génération de cadres qui doit se remettre en question. Dans une équipe où Varane a sombré, où casemiro nâa pas existé, où Benzema nâa fait que rater et gareth bale traversé le match comme un fantôme, la déclaration polémique de Modric prend tout son sens
«Cristiano a mis 50 buts et on ne peut pas trouver un joueur qui en marque autant. Certains devaient franchir un cap, non pas mettre 50 buts, mais au moins ce qui nous manque, deux ou trois joueurs qui puissent mettre 15-20 buts. Mais on ne les a pas », avait regretté le Ballon dâOr 2018.
Le Real, qui a remplacé le meilleur joueur de son histoire par un simple attaquant lyonnais sur le banc (Mariano Diaz), paye aujourdâhui lâincapacité de ses dirigeants à tourner la page dâune époque dorée. A Bernabeu, Madrid a perdu ses deux derniers matches de Ligue des champions à domicile par trois buts d'écart (0-3 contre le CSKA Moscou, 1-4 ce soir) alors que cela ne lui était jamais arrivé auparavant. Du passé, il va bien falloir faire table rase.
Tadic et la jeunesse au pouvoir
Ce soir, lâEurope du foot a (re)découvert un talent caché : Dusan Tadic. Déjà magnifique à lâaller, lâailier de 30 ans illuminé la rencontre de son talent. Il sert Ziyech sur le premier but, puis efface Casemiro dâune roulette dâécole avant de transmettre à Neres sur le second.
Surtout, lâinternational serbe marque le but qui élimine le Real au terme dâun mouvement collectif de génie. Tadic a su fluidifier lâentrejeu de lâAjax et, avec un but et deux passes décisives, a obtenu la note de 10/10 dans LâEquipe. On peut aussi citer Matthis De Ligt (19 ans), capitaine et patron de charnière, André Onana (22 ans), impérial sur sa ligne, Frenkie de Jong (21 ans), qui a donné une leçon à ses futurs rivaux, mais aussi Hakim Ziyech (25 ans), Donny Van De Beek (21 ans), Moussair Mazraoui (21 ans)⦠Ce concentré de jeunes talents, épaulés par les « anciens » du club (Schöne, Blind, Huntelar), a joué crânement sa chance dans un Bernabeu progressivement éteint. Sur les deux rencontres, la qualification des Ajaccides est somme toute logique, et sonne le triomphe dâune force collective déjà aperçue en Ligue Europa il y a deux ans. Le mérite revient aussi à lâentraîneur, Erik Ten Hag, et plus globalement à la politique dâun club qui nâoublie pas ses valeurs.
« Câest une confirmation de notre philosophie , celle des Pays-Bas et surtout celle de lâAjax », a déclaré le coach néerlandais en zone mixte »
Lâhistoire glorieuse du club commence à dater (le dernier de ses 4 sacres européens remonte à 1995), et si lâAjax nâa « que » 85 millions dâeuros de budget (soit lâéquivalent du salaire amassé par Gareth Bale depuis 5 ans !), elle conserve une identité de jeu forte (possession, pressing, vitesse) héritée du « football total » hollandais. Il nây avait quâà voir les célébrations des joueurs avec leurs supporters venus dâAmsterdam pour comprendre que lâAjax est un club mythique.
Une première réunion de crise a déjà eu lieu à Madrid après la défaite face à l'Ajax, à l'initiative de Florentino Pérez. (@diarioas)
Un recrutement "galactique" (joueurs + entraîneur) et la vente de certains joueurs ont été évoqué. pic.twitter.com/0sxuUfYN4m
— BeFoot (@_BeFoot) March 6, 2019
La fin dâun cycle, dâaccord, mais ne serait-ce pas le début dâun nouveau ?