AvideceWopyBalab

Les grands écrivains étaient des passionnés de football. Qui osera dire désormais que ce sport séculaire est fait pour les décérébrés ? Il est bien plus intellectuel et complexe qu’on ne le croit. Et l’ouvrage La littérature marque des buts, paru aux éditions Folio le démontre joliment à ceux qui ne seraient pas convaincus.

Le football, c’est bien plus qu’un simple sport. C’est une évasion au sein de laquelle nous, pauvres mortels, regardons et acclamons des gladiateurs qui livreront pendant 90 minutes le combat du siècle. Le football est un voyage dans laquelle l’inspiration est en perpétuel mouvement, tel un dribble de Pelé, une passe de Platini ou un contrôle majestueux de Zinédine Zidane. Autant de gestes fabuleux qui suscitèrent nos « Wouah ! » enchantés, et suscités chez quelques écrivains l’envie de romancer le ballon rond.

Stéphane Chomienne, un écrivain amoureux du football, et Hubert Artus, qu’on connaît pour ses contributions régulières dans divers magazines spécialisés, ont eu la riche idée de réunir des textes littéraires dont le foot était le « rond central ». Ainsi, nous parcourons, un peu hors du temps, le récit d’Albert Camus qui, dans son roman autobiographique « Le premier homme » publié post-mortem en 1994 par la fille de l’écrivain : « Il venait d’être titulaire de l’équipe du lycée et, trois jours auparavant, avait goûté pour la première fois, défaillant, à la bouche d’une jeune fille ». Car le ballon rond est aussi une affaire d’affirmation de soi, une façon de s’ériger, le temps de quelques instants, en héros du moment.

Les textes ne se ressemblent pas, ils nous surprennent, nous étonnent. Nous pouvons éprouver une grande bouffée de compassion pour Nick Hornby et son « Carton jaune », où un jeune Nick supporter d’Arsenal ne supportait pas les défaites de son équipe favorite (« Ce but de l’ennemi n’apaisa pas mon tourment, il le prolongea à l’infini »). Nous pouvons aussi, comme Jean-Noël Blanc dans son texte (absolument sublime) « Le foot en sept leçons plus une », poétiquement décortiquer la geste d’un footballeur dans un match (« Le bonheur, c’est de réussir un dribble clair »). Ou encore, comme Philippe Delerm, se réjouir de l’arrivée du multiplex des matchs de Ligue 1 le vendredi, donnant une impression de confort à nos week-ends reposants.

Nous n’accorderons que peu d’importance aux textes de Salman Rushdie et Vincent Duluc, qui, au sens du chroniqueur qui écrit ces lignes, furent assez futiles et secs dans le ton. Deux petits défauts dans un sublime et vaste recueil à qu’on ne saurait que trop vous conseiller de vous procurer.