AvideceWopyBalab

Le 7 juin 2019, le coup d’envoi de la 8e édition de la Coupe du Monde de football féminin sera donné en France. Une première dans un pays qui attend beaucoup de son équipe nationale, après plusieurs rendez-vous manqués.

Ecrire la première ligne

Alors que l’équipe masculine vient d’ajouter une deuxième Coupe du Monde à son palmarès bien rempli, la sélection féminine n’a pas encore ouvert son compteur au niveau international. La meilleure performance remonte à 2011 avec une demi-finale de Coupe du Monde, qui s’est ajoutée à plusieurs quarts de finale perdus (Mondial 2015 et Euro 2009, 2013 et 2017). Une série de contre-performance inattendue, tant la génération menée notamment par Louisa Necib semblait promise à une victoire internationale.

Portée par un football de club dominateur, incarné par l’Olympique Lyonnais qui enchaine les succès nationaux et européens, l’équipe de France féminine n’a pour le moment pas réussi à concrétiser les espoirs placés en elle. L’accueil de la Coupe du Monde 2019 semble donc être une opportunité parfaite. A l’image des garçons qui ont ouvert leur compteur à domicile (Euro 1984 puis Coupe du Monde 1998), les filles peuvent frapper un grand coup en rejoignant le cercle des championnes du monde.

L’échec de l’Euro 2017 a sonné la fin de la génération dorée et de nombreux changements ont été opéré au sein de la sélection. Corinne Diacre a été nommé sélectionneur et a décidé de donner sa chance aux jeunes : Grace Geyoro, Hawa Cissokko, Viviane Asseyi ou encore Estelle Cascarino font partie des nouveaux espoirs du football féminin français, bien encadrées par quelques anciennes comme Eugénie Le Sommer, Wendy Renard ou Gaetane Thiney. Malgré quelques revers cinglants, cette équipe de France new look semble trouver son rythme avec des résultats très positifs lors des derniers matchs (victoires face au Canada et l’Allemagne, références mondiales), espérons que ce bel élan se poursuive jusqu’à la Coupe du Monde pour des raisons sportives évidentes, mais également pour créer un engouement autour des Bleues.

En effet, au-delà de la déception sportive, les échecs successifs ont semblé replonger l’équipe de France féminine dans l’oubli. Alors que le parcours de 2011 avait passionné de nombreux spectateurs, il avait également suscité de nombreuses attentes qui se sont transformées, les unes après les autres, en frustration. La renaissance de l’équipe masculine n’est également pas étrangère à ce relatif désintérêt. Souvenez-vous, 2011, c’est l’année qui suit le désastre de Knysna et ces Bleues ont redonné aux français l’amour du maillot frappé du coq. Ceci dit, la victoire des hommes de Didier Deschamps en Russie peut, à l’inverse, créer un engouement autour des coéquipières de Wendy Renard qui auront l’occasion de placer le football français à un niveau d’excellence rarissime. En effet, jamais un pays n’a eu ses équipes masculine et féminine championnes du monde en titre en même temps.

Créer la marque BleuE

Directement lié à l’enjeu sportif, cette Coupe du Monde organisée en France est également un virage économique important pour le football féminin français. A l’instar de ce qui passe chez les hommes, l’équipe de France féminine pourrait devenir le fer de lance du développement de son secteur.

La compétition sera pour la première fois diffusée sur TF1 !

Forcément, organiser un tel événement peut considérablement aider. Première bonne nouvelle : la compétition sera pour la première fois diffusée sur TF1, gage d’une visibilité accrue. Par ailleurs, la D1 féminine sera retransmise sur Canal+ à partir de la rentrée prochaine, une bonne occasion de démocratiser le football féminin et de mettre en avant les stars de l’équipe de France évoluant dans le championnat. En effet, le football féminin français manque d’icônes et aurait besoin de son Griezmann, Mbappé ou Pogba. Ce genre de joueurs que tout le monde connaît, même ceux qui ne suivent pas le football de manière assidu. Cette exposition médiatique va donc permettre une création économique d’icônes du football féminin. Celles que les marques et les diffuseurs vont mettre en avant pour promouvoir l’événement, celles qui susciteront le plus d’attente et donc, celles qui rempliront les stades et feront grimper les audiences.

Cette Coupe du Monde peut également permettre à la Fédération d’élargir son champ d’action. Globalement, le football féminin ne rassemble pas le même public que le football masculin, et n’intéresse donc pas les mêmes sponsors. Même si nous retrouverons lors de cette compétition les marques associées à la FIFA (Adidas, Coca-Cola, Wanda, Gazprom, Hyuindai/Kia, Qatar Airways, Visa), il est possible que la FFF cherche à s’associer à de nouveaux partenaires. Grâce à cela, la Fédération Française de Football pourrait créer un nouveau terrain de jeu économique et élargir sa visibilité auprès de spectateurs inatteignables via le football masculin.

Développer la pratique

Organiser une Coupe du Monde, c’est également espérer laisser un héritage positif au sport mis en lumière. Chaque compétition organisée entraine une hausse des licenciés, et un bon résultat peut carrément créer une explosion de la pratique.

En préambule de la compétition, la diffusion du championnat sur Canal+ et la campagne de communication menée par la Fédération vont servir à préparer le terrain. Cette dernière commencera d’ailleurs dès le mois de septembre, à Rennes, d’où partira la tournée du Trophée qui voyagera dans toute la France durant l’année. Rennes n’est pas un choix anodin puisque c’est en Bretagne que se déroulera la Coupe du Monde féminine U20 à partir du 5 aout prochain. Une compétition réussie, associé à un bon parcours de l’équipe de France pourrait donc permettre au football féminin de compter de nombreuses nouvelles joueuses à la rentrée 2019, un objectif assumé par la FFF :

L’héritage que nous voulons laisser après ce mondial est très important pour nous. Nous avions 82 000 licenciés en 2011. Nous sommes aujourd’hui à 165 000. Nous visons la barre des 200 000 en 2019.
Brigitte Henriquès, vice-présidente de la Fédération

Par ailleurs, une Coupe du Monde réussie pourrait donner des idées à certains clubs. Aujourd’hui, la D1 féminine est dominée par l’Olympique Lyonnais, véritable référence donc, mais également par le PSG ou Montpellier qui font partie des meilleurs clubs européens, ainsi que le Paris FC qui est en plein développement. Derrière, le fossé est important. Il y a d’abord une question de moyens financiers qui freinent des clubs comme Albi ou Soyaux mais aussi, parfois, une question de priorités. Certains clubs pourraient donner plus d’importance à leur section féminine, voire même en créer une lorsque ce n’est pas encore le cas, en espérant surfer sur l’engouement de la Coupe du Monde 2019.

Accompagnée d’autant d’enjeux différents, cette Coupe du Monde féminine 2019 pourrait donc faire basculer le football féminin français dans une autre dimension. Les Bleues ont déjà prouvé par le passé qu’elles pouvaient entrainer des millions de personnes à partager leur rêve, l’occasion est trop belle de le concrétiser et de broder une première étoile sur leur tunique.