AvideceWopyBalab

Hier, nous étions à Lille pour assister à l’étape de sélection régionale de la Coupe du Monde des sans-abris. Comme annoncé mardi dans notre article, nous étions partenaire de ce tournoi qui permettait à l’équipe vainqueur de se rendre à Montpellier pour disputer la compétition nationale.

C’est vers 10h que les premières équipes ont commencé à taper dans le ballon sous une pluie battante. Sur un terrain synthétique usé par le temps, les équipes tentent de terminer premier de leur poule pour disputer la finale. Quelques maillots de footeux sont visibles ça et là: Monaco, Lacazette, Real Madrid … Arrivé depuis peu, je décide d’aller discuter avec Fabrice Lecomte de la Mairie de Lille et Alexandra, étudiante à Lille 2, qui ont permis ce partenariat.

La pluie continuant, je me résigne à rentrer pour le déjeuner, espérant du mieux dans l’après-midi. Je reviens donc vers 14h pour la fin des matchs de classement. La météo plus clémente, je me place entre les deux terrains afin de juger le niveau de jeu. Et là, surprise : Ça joue bien. Vraiment bien. Ça joue dur aussi avec de vrais duels physiques qui mènent parfois à des chutes douloureuses mais toujours dans l’esprit du jeu. Certains se détachent techniquement, comme le « numéro 7 bleu » qui surnage dans son équipe. Malheureusement, cela ne suffira pas à atteindre le dernier carré. Une contre-performance qu’il ne digère pas.

Les « violets » du Phare CHRS de Béthune, eux, joueront le match de la troisième place. Ravi de cette performance, l’entraîneur débriefe rapidement avec ses joueurs. L’un d’eux demande alors :

– « Donc au pire, on finit quatrième alors ?

– Ah mais rêvez pas, de toute façon ce soir vous dormez dehors les gars ! »

Éclat de rire général, comme un résumé de la journée. Ils finiront quatrième de la compétition.

Du jeu et des sourires : le bilan de la Coupe du Monde des sans-abris à Lille

Le Phare CHRS de Béthune

Avant la finale, une petite pause me permet d’aller voir les animations disponibles. Entre deux-matchs, les joueurs se retrouvent dans le baby-foot humain pour un match plein d’entrain. Les petits et les grands s’essayent également au tir de précision. Un petit concours est organisé pour les enfants : Les meilleurs gagnent des places pour le match Lille – Angers, offertes par le LOSC.

« On en a un qui avait signé au PSG il y a quelques années »

Je me dirige une nouvelle fois vers le terrain et en profite pour discuter avec Christian Guillemont du collectif « En Jeux » qui s’occupe préparer l’Équipe de France pour la Coupe du Monde en juillet à Glasgow. Joueur de football depuis 43 ans, il travaille avec l’équipe nationale depuis 2008. Il est éducateur sportif depuis l’âge de 16 ans, aussi bien en jeune qu’en sénior.

Vous avez vu du potentiel aujourd’hui ?

« J’ai vu une bonne petite quinzaine de joueurs qui ont des très beaux potentiels. Après, la particularité c’est que là on joue à 7 contre 7 et la Coupe du Monde a lieu à 4 contre 4, sur un terrain beaucoup plus petit avec des petits buts, des parois sur les côtés … c’est un jeu plus intense, beaucoup plus technique donc on cherche pas forcément des super joueurs défensivement, des physiques impressionnants, c’est pas forcément ce dont on a besoin. On essaie de voir le potentiel qu’on a sur les joueurs et après on va les revoir avec d’autres joueurs, dans d’autres conditions et le 27 mai on finalisera le recrutement pour préparer le stage qui aura lieu à Rouen pour partir à Glasgow en juillet.

J’ai cru entendre que certains joueurs avaient évolués en CFA ?

« Oui, on en a un qui avait signé au PSG il y a quelques années, un autre à Poissy. Là, on en a un de 18 ans qui jouait en DH. On a de belles sorties de joueurs. « 

Il me confie que le plus gros du travail c’est aussi de trouver le financement pour le transport, l’hébergement, l’équipement … Et également la gestion des dossiers sociaux puisque des problèmes peuvent être liés à des détails de nationalités.

« On a des joueurs qui ont des doubles nationalités, on a aussi le droit à quelques joueurs étrangers. L’année dernière à Amsterdam, on a eu des pays qui ont été interdits de visas donc on se retrouve avec des joueurs de nationalités étrangères qui sont recrutables mais on va être limité en nombre et par l’origine exacte du joueur. »

Vous avez une aide de la FFF ?

« La FFF ne nous aide pas vraiment. On a le Crédit Agricole qui nous aide beaucoup financièrement, on a Nike pour les équipements et on a surtout la fondation l’Abbé Pierre qui nous aide énormément aussi. Ils nous mettent à disposition les installations à Rouen, ils prennent en charge, entre autres, les repas et nous aide aussi financièrement pour les déplacements. Faut savoir que pour qu’un joueur puisse participer à la Homesless World Cup, il faut verser 1000€ par joueur pour pouvoir être hébergé, les repas etc … Le gros avantage que ça a, c’est au niveau des joueurs : le fait de se retrouver avec un but et être recruté. C’est pas parce qu’un joueur n’a pas été pris cette année qu’il ne le sera pas l’an prochain. L’année dernière on a un joueur qui était venu 4 ans de suite et qui n’a été pris que la quatrième année. Il s’était toujours dit « je serai pris » et il bossait pour. Donc ça leur redonne des objectifs. Là, j’ai pris deux joueurs après leur deuxième année, au final j’ai un éducateur sportif qui va essayer de les prendre dans son club pour tenter de les faire travailler, faire des contrats civiques … ce sont des petites marches qui sont gravies et qui les font progresser. On est aux environs de 60% de réinsertion sur chaque année. Entre 60 et 70%. Le coach actuel de l’Équipe de France, c’était un de mes anciens joueurs en 2010 quand on est allé à Rio. Il a passé ses diplômes d’éducateur, maintenant il est marié, il a un enfant et il habite Paris. Il est éducateur sportif maintenant et il s’occupe bénévolement de l’Équipe de France. Donc c’est un peu plus que des matchs. »

« Les blancs manche rouge contre les bleus »

Du jeu et des sourires : le bilan de la Coupe du Monde des sans-abris à Lille

Les joueurs se saluent avant la finale

Vient l’heure de la finale qui se jouera entre « les maillots blancs manche rouge et les bleus » soit entre l’AFR Roubaix et Ozanam 1. Si la plupart des équipes sont déjà rentrées, il reste pas mal de monde pour ce dernier match de la journée. Un match archi-dominé par Ozanam grâce à leur collectif bien huilé et le soutien du banc qui chante « allez les bleus ! ».

La remise des coupes a lieu une demi heure plus tard. Le Président de l’Université de Lille 2 annonce que le synthétique sera complètement refait l’an prochain. Une excellente nouvelle. Peu importe le classement final, ils sont simplement heureux d’être là et d’avoir participé à cette journée. L’occasion de montrer une autre facette des sans-abris et de leur donner un objectif commun. Merci aux organisateurs qui se donnent beaucoup de mal pour que ce rassemblement ait lieu. Vous trouverez ci-dessous quelques morceaux choisis de la journée. Un grand merci également au Phare CHRS de Béthune de nous avoir envoyé la vidéo qui suit, image de la bonne ambiance qui régnait sur les terrains hier.

Au fait, vous vous rappelez du « numéro 7 bleu » ? Il sera rappelé pour le rassemblement national cet été. On a l’oeil chez PKFoot.

Du jeu et des sourires : le bilan de la Coupe du Monde des sans-abris à Lille

Du jeu et des sourires : le bilan de la Coupe du Monde des sans-abris à Lille

Christian Guillemont, venu superviser les joueurs, et le « 7 bleu »

 

Du jeu et des sourires : le bilan de la Coupe du Monde des sans-abris à Lille
Du jeu et des sourires : le bilan de la Coupe du Monde des sans-abris à Lille

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Du jeu et des sourires : le bilan de la Coupe du Monde des sans-abris à Lille