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Selon une enquête parue dans le journal britannique The People, des trafiquants se faisant passer pour des agents de joueurs dupent chaque année des milliers d’enfants, souvent originaires d’Afrique et en quête d’une carrière professionnelle, afin de leur soutirer de l’argent.

Un (faux) passeport pour la gloire.

La combine est très simple. Les escrocs commencent par se créer un faux compte sur les réseaux sociaux reprenant le nom d’un agent officiel de la FIFA. Après un repérage et grâce à de faux documents présentant l’emblème de grands clubs de Premier League, ils proposent des essais en Angleterre, à condition que la famille paye le voyage et le visa. L’enfant est alors envoyé dans un pays, tel le Sénégal ou le Népal grâce à un faux passeport, en attente d’un visa qui n’arrivera jamais.

Des enfants, parfois âgés de 13 ans, qui se retrouvent donc sans papiers, sans argent, et sont ensuite utilisés par des réseaux criminels, de prostitution ou de trafic de drogue.

Chris Eaton, ancien directeur de la sécurité de la FIFA et ex-Interpol, a dénoncé le manque d’implication des instances internationales.

La Confédération africaine et la FIFA trahissent leur devoir moral. Ils parlent du rêve d’être footballeur mais, si souvent, le rêve tourne au cauchemar.
Chris Eaton

Trafic d'enfants, le "vilain petit secret" du football

« Ils vous font croire que vous êtes le nouveau Drogba »

Andrew Gerald est Nigérian. A 18 ans, à Lagos, un « agent » lui annonce qu’il a le talent de jouer en Premier League. Il lui propose de faire un essai, d’abord en Roumanie. Sa famille réunit 700 dollars pour payer un billet d’avion jusqu’au Sénégal où il devra attendre un visa pendant une semaine… Il est resté 14 ans à Dakar avant de pouvoir s’échapper. Aujourd’hui, il a 33 ans et joue en Macédoine, sans être payé.

« J’ai fait confiance à ce gars. Il m’a promis que je serais pro. J’ai tout perdu. Financièrement, je ne pouvais pas partir mais je ne voulais pas abandonner mon rêve de jouer au football. Ils vous font croire que vous êtes le nouveau Didier Drogba … »

Trafic d'enfants, le "vilain petit secret" du football

Les trafiquants sont parfois présents même lors de matchs informels

Dans des pays comme le Nigéria, le Sénégal ou le Ghana où le salaire annuel est d’environ 900 euros, la possibilité de devenir le prochain Sadio Mané, passé de la pauvreté à un contrat de 100 000 euros par semaine à Liverpool, est plus qu’alléchante et suffit amplement à profiter des espoirs de jeunes footballeurs.

Une lutte difficile

Malheureusement, de nombreuses familles n’admettent pas l’escroquerie qu’elles ont subit, par honte, empêchant parfois les enquêteurs de poursuivre pénalement les criminels.

« C’est le vilain petit secret du football », dit Matthew Hall, porte parole de l’association Mission 89 qui sensibilise sur le trafic d’enfants via le sport. « C’est aussi simple que d’arriver dans un village d’Afrique avec un costume blanc et promettre une carrière professionnelle. »

Malgré le travail intense effectué par les clubs de PL, une centaine d’enfants sont toujours arnaqués chaque année pour des essais en Angleterre.

« Nous ne pouvons pas fermer les yeux là dessus » à déclaré Barbara Young, membre de la Chambre des Lords au Parlement britannique. « Les noms des clubs de Premier League et de Championship sont utilisés. Ils doivent se sentir concernés. »

« C’est très inquiétant […] Les clubs de Premier League ne demanderaient jamais aux familles de payer pour les essais de leurs enfants. De plus, des règles strictes interdisent à tous les clubs anglais de signer des jeunes âgés de moins de 18 ans venant de l’étranger. » a déclaré pour sa part un porte parole de la Premier League.

Une hotline a été mise en place pour aider les enfants pensant avoir été trompés. Depuis décembre, 16 ont déjà appelé.

Trafic d'enfants, le "vilain petit secret" du football

Photo de Yaya, faussaire parisien actuellement recherché

Et ce problème est bien plus proche de nous que ce que vous imaginez. Les enquêteurs suivent actuellement la piste d’un faussaire, appelé « Yaya » et aperçu à Gare du Nord en train de fournir un faux passeport à une victime. Un autre de ses passeports avait été retrouvé sur un jeune Malien, arrivé à Paris grâce à des passeurs libanais. Après lui avoir promis un essai en Europe, il a tout perdu et a été appréhendé par les autorités bijoux et téléphones portables dérobés pour le compte d’un réseau.

Chaque année dans le monde, les rêves d’environ 15 000 jeunes africains sont ainsi utilisés à des fins criminelles.