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Il n’aura pas fallu longtemps à Red Bull pour devenir le leader de la boisson énergétique. En quelques années, la canette bleue s’est imposée à travers le monde. Et tout ça grâce au génie de son fondateur, mais aussi à une communication très bien rodée.

D’abord en parrainant les sports extrêmes et leurs champions, puis en se lançant dans le sport automobile ou récemment le saut depuis l’espace. Quoi de mieux pour se donner une image provocatrice et énergisante ? Le renom de l’entreprise n’est plus à faire dans ces domaines, où son écurie de F1 occupe les sommets. Mais qu’en est-il du sport roi ?

Diffusé à travers le monde, générant des milliards et place forte du marketing, le football se devait d’intéresser Red Bull. Son gérant Dietrich Mateschitz a pourtant attendu les 21 ans de la boîte avant de s’y lancer. Mais à l’inverse de Coca-Cola, partenaire de la Coupe du Monde entre autres, son entrée sur les pelouses s’est faite bien plus directement.

En 2005, Red Bull rachète le SV Austria Salzbourg, en difficulté financière, et fait place nette. Le nom devient Red Bull Salzbourg, les taureaux prennent place sur le blason et le maillot de l’équipe qui va évoluer dans… la Red Bull Arena ! L’ancien club est donc nettoyé à la javel. Pourtant, l’Austria a connu quelques parcours européens au fil de ses 70 ans d’histoire. Il aura fallu la grogne des anciens supporters pour que le club nouveau-né ajoute l’histoire de l’ancien club à la sienne ! Et cela est loin de plaire aux supporters qui ont délaissé en nombre le Red Bull. Le foot-business s’entrechoque avec le foot passionné, et ce n’est pas forcément le plus riche qui gagne. Après la fabrication de l’effectif, le club parvient à s’imposer dans le championnat autrichien. Au niveau européen par contre, l’équipe s’invite aux barrages de la C1 et aux phases de poule de la C3 sans aller toujours plus loin. Le succès n’est donc pas forcément au rendez-vous pour la firme autrichienne.

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Qu’à cela ne tienne, l’entreprise investit en 2006 en MLS et transforme les New-York Metrostars en Red Bull NewYork. Et comme à Salzbourg, tout change. Le logo, les maillots et le stade, nommé Red Bull Arena, encore. Après quelques années d’échecs en playoffs, Thierry Henry et Rafael Marquez – entre autres – rejoignent le club. Si la MLS est un championnat en pleine croissance, le Red Bull NY ne s’y impose pas vraiment. Encore aujourd’hui, les hommes de Jesse Marsch sont en quête d’un titre. Cependant, si le succès sportif n’est pas celui escompté, l’entreprise n’a pas failli au niveau marketing. En effet, un ambassadeur comme Thierry Henry, l’un des pionniers de la MLS pour nous autres, reste une bonne chose pour la marque. C’est pourtant les ambitions sportives qui doivent être nourries, et le compte n’y est toujours pas. Après la MLS et la tipico Bundesliga, il est temps d’investir dans un championnat majeur.

Et c’est chose faite en 2009. Enfin, pas tout à fait. Encore une fois, Red Bull mise sur l’avenir et d’énormes ambitions, puisque le club racheté pointe au 5e échelon du football allemand. Le SSV Markranstädt, dans la banlieue de Leipzig, ne va pas déroger à la règle et va subir une remise à niveau. S’il évolue dans la Red Bull Arena, que ses couleurs sont le blanc et le rouge et que les taureaux sont le sponsor principal et le blason du club, celui ci ne s’appelle pas Red Bull Leipzig. La faute au règlement de la Bundesliga qui interdit le naming d’un club par une entreprise non-allemande. Place donc au RB Leipzig, pour « RasenBallsport Leipzig » (sport de balle sur gazon). La montée en 4e division est une formalité, mais le club s’y reprendra à trois fois avant d’atteindre la 3.Liga. L’accession à la 2.Liga se fait dans la foulée. En 5 ans, le RB Leipzig est donc passé d’un club anonyme à un club de deuxième division allemande.

Pourtant, cette success-story est loin de faire l’unanimité outre-Rhin. Là ou le football populaire est roi, l’argent et le manque de traditions et d’histoire du club fait tâche. La ville même de Leipzig n’est pas entièrement derrière le RBL, factice au gout de certains. La marque a même échoué dans le rachat d’un autre club de la ville trois ans plus tôt. Historique, le FC Sachsen Leipzig ne devient donc pas le premier club allemand de Red Bull, même si les difficultés financières le mine. Les fans du Lokomotiv Leipzig et du Chemie s’opposent pour la plupart au RBL et prônent le football des racines, populaire, parfois virulent en tribune. Si comparaison il peut y avoir, le RBL est confronté à l’image qu’a eu le PSG après le plan Leproux et son rachat. Loin de toucher des ultras passionnés, le club attire les familles.

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Le club ne manque pourtant pas d’ambition. On ne recrute pas encore de stars, mais en se basant sur un effectif jeune avec des joueurs qui ont connu les différentes montées ou qui viennent des autres clubs de Red Bull, l’objectif déclaré est la promotion en Bundesliga. Et à 4 journées de la fin, le RBL a presque atteint son objectif, puisqu’il occupe la seconde place à un point du leader, 13 points devant le 4e et 6 points devant le troisième qui devra passer par des barrages. Il a été fait écho dans la presse allemande d’une enveloppe de transfert à hauteur de 100 millions débloquée en cas de montée, et les noms de Zinédine Machach (TFC) mais surtout Leroy Sané (Schalke 04), grand espoir allemand, ont été associés au club pour cet été. Et le PDG de Red Bull s’autorise à rêver puisqu’en terme d’objectifs à long terme, le titre en Bundesliga et la Ligue des Champions trottent dans sa tête.

Le succès sportif est ici assez impressionnant. En partant d’un club amateur, Red Bull est sur le point d’atteindre la Bundesliga. Pourtant, on attend encore la confirmation pour que le succès soit total. En tout cas, le premier investissement dans un championnat majeur porte ses fruits. Mais en Allemagne plus qu’ailleurs, la marque est décriée par sa stratégie. Au lieu de partir de rien, elle efface l’histoire d’un club, et tue très probablement l’amour des supporters. S’il n’est pas question de débourser des millions dès l’entrée au capital et que le recrutement se fait grâce à un réseau bien tissé, il est vrai que l’investissement de Red Bull dans le foot nous donne des entités un peu creuses, ou en tout cas loin du football passionné.

Red Bull a offert à l’Allemagne de l’Est son premier club compétitif au niveau professionnel depuis longtemps, et il ne semble pas vouloir s’arrêter en si bon chemin. Il ne faut pas non plus oublier son club au Brésil, le Red Bull Brazil, qui est également une académie, ainsi que le Red Bull Ghana, qui a les mêmes caractéristiques mais qui a été dissout en 2014. Ajoutez à cela des investissements dans le hockey en Allemagne et en Autriche, et Red Bull s’offre de la visibilité pour encore quelques décennies. Au profit du jeu ? Cela reste à voir…