Cette semaine, on a regardé un choc mouvementé entre Dortmund et Leipzig, et un FC Barcelone-Real Madrid moins prolifique que prévu. On applaudit aussi les bourgeons Pellegrini et Serdar, et les confirmés Lukaku, Ilicic, Vardy et Firmino.
Un Borussia capable du meilleur comme du pire
Match observé : Dortmund 3-3 Leipzig
J’avais quitté Dortmund sur la défaite face au FC Barcelone. Depuis, Favre a concocté une défense à 3 amovible en défense à 5, qui permet de titulariser – enfin – Zagadou. En me fiant à ce que j’ai lu, et à ce que les résumés de matches voulaient bien montrer, il y a eu 2 victoires poussives (Hertha Berlin et Slavia Prague) et 2 autres plus faciles (Mayence et Düsseldorf). Ce choc face à Leipzig était une opportunité de voir ce que donnait ce système, de confirmer l’importance de Brandt – auteur d’avant-dernières passes fabuleuses dernièrement – dans le jeu, et d’éprouver la faculté dingue de Sancho à être décisif. Leader de Bundesliga, Leipzig était un parfait test. Ce match fou a été riche en enseignements.
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La première période illustre tout ce que ce dispositif propose de mieux. Zagadou, dans les duels aériens (notamment face à Poulsen) et à la relance, fait énormément de bien à cette équipe. Le fait d’être à 3 derrière permet aussi à Guerreiro et Hakimi de monter sans trop déséquilibrer l’équipe. Avec le ballon, en l’absence de Witsel, Weigl officie avec Brandt en double pivot. Malheureusement, il manque de volume, et ne semble à l’aise que quand il a du temps pour orienter le jeu, où sa précision fait merveille. Au contraire, Brandt fait figure de couteau suisse en se proposant systématiquement au défenseur qui a le ballon, balayant le terrain en largeur. Garant de la créativité dans l’entrejeu, il est le seul capable de perforer l’axe par la passe ou le dribble, pour trouver Hazard, Sancho ou Reus dans les pieds ou en profondeur. Lorsque les défenseurs ne peuvent pas passer par lui, ils jouent en longs ballons ou sur les côtés, ce qui est forcément plus facile à défendre. Autrement dit, son importance est capitale, et si Marquinhos le neutralise comme il l’avait fait pour Pogba à Old Trafford, Dortmund deviendra prévisible. Autrement, ce sera un tout pour l’attaque téméraire et prolifique.
Dortmund 3-3 Leipzig
Un match fou.
Le 3-4-2-1 du BvB a très bien manœuvré le 4-4-2 de Leipzig sur la largeur en première période, avec Brandt en chef d'orchestre.
En seconde période, erreurs individuelles de Dortmund et intensité de Leipzig pour revenir. pic.twitter.com/ghcxF3HeJE— Julien Momont (@JulienMomont) December 17, 2019
Le trio d’attaque bouge beaucoup. On a vu chacun des trois occuper tour à tour l’axe, le côté droit ou le côté gauche. Favre les incite sans doute à faire ça pour brouiller les pistes, mais aussi pour ne pas déprimer le pauvre Reus, souvent celui qui est amené à jouer dans l’axe, où il touche peu de ballons, court beaucoup dans le vide, doit parfois être un simple relais, et s’époumone pour peu de plaisir. L’absence de pur avant-centre, corrigeable lors du mercato hivernal, est la principale limite du Borussia, qui affole les compteurs malgré tout… ce qui en dit long sur ses individualités.
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Concernant les points faibles de cette formation, le milieu manque de récupérateurs. De plus, cette équipe peine à défendre face à un adversaire capable de garder le ballon haut et de jouer en attaque placée. C’est paradoxalement sur une phase où Dortmund se trouvait avec une ligne de 5 défenseurs que Schick a égalisé, profitant des lacunes de Guerreiro. Un autre aspect pourrait profiter au PSG, comme il a profité à de nombreux adversaires du BvB cette saison : la gestion des temps faibles est calamiteuse, comme l’illustre ce début de seconde période avec un but encaissé sur une boulette de Bürki, un autre finalement refusé pour hors-jeu, une grosse occasion concédée sur corner, puis un autre but encaissé sur une bévue de Brandt (buteur et globalement fabuleux en première période, un peu plus laborieux en seconde) en moins de… 10 minutes. Sancho mettra fin à cette mauvaise phase sur un but presque venu de nulle part, mais une telle absence coûtera cher en Ligue des champions. Enfin, et c’est propre à la Bundesliga, la prise de risque à la relance frôle parfois l’absurde, même si c’est passé presque systématiquement. Zagadou – comme Upamecano de l’autre côté – se permet souvent des dribbles incroyables en dernier défenseur pour s’ouvrir une meilleure ligne de passe. Cette pratique courante en Allemagne, qui provoquerait un infarctus chez un coach de Ligue 1, pourrait s’avérer dangereuse face à un attaquant qui ne se jette pas autant que Poulsen ou Schick. Globalement, le Borussia est sympa à regarder, plus solide qu’en début de saison, mais dispose de grosses lacunes que ses fortes individualités ne pourront pas toujours combler. Affaire à suivre, car rien ne dit que le visage de cette équipe n’aura pas changé d’ici février.
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Le Clasico des timides
Match observé : FC Barcelone 0-0 Real Madrid
On a été tellement habitués à de beaux matches entre le FC Barcelone et le Real Madrid qu’on attendait peut-être trop de ce choc. Il n’y a pas eu d’envolées lyriques, lors de cette affiche pas ennuyeuse non plus, mais qui laisse forcément un goût d’inachevé. Les mastodontes du football espagnol semblaient ne pas vouloir risquer la défaite, et n’ont pas fait tout ce qu’il fallait pour chercher la victoire. Dommage, car aucune équipe n’était tactiquement au top, laissant quelques trous exploitables par son adversaire… mais personne n’a voulu tenter le diable.
Sans être inintéressant, le premier Clasico sans but depuis 2002 aurait pu être bien plus énergique.
Le Barça ne voulait pas plus qu'un point, et après une belle mi-temps, le Real l'a laissé le prendre. L'enjeu était peut-être un peu trop important pour risquer la défaite.— Thibaut Vancaeyseele (@TVancaeyseele) December 18, 2019
Le Barça, à domicile, est habituellement dominateur, même face au Real Madrid. D’ailleurs, le début de match laisse présager une rencontre maîtrisée, avec des premières minutes où le cuir est confisqué par les Catalans. Joie de courte durée pour les spectateurs du Camp Nou, qui assistent à une meilleure première période madrilène, avant que les débats ne se rééquilibrent en seconde période. De ce FC Barcelone, on regrette un bloc trop bas, le manque d’initiatives, de mouvements, alors qu’il y avait matière à enflammer le match. En face, le Real Madrid était en position haute, certes, mais sans imprimer de gros pressing. Un quadrillage passif du terrain est normalement un suicide face au Barça, qui fait tourner et avancer la balle rapidement. Mais cette fois-ci, il manquait de vitesse à la relance, le pauvre De Jong essayant parfois de donner de la vie au milieu, mais n’étant pas aidé par un Sergi Roberto limité, et un Rakitic sur le déclin. L’entrée de Vidal a permis au Néerlandais de tenter quelques excursions, qu’on aurait aimé plus nombreuses. Peu trouvé, Messi a bien réussi à provoquer quelques étincelles, comme cette passe pour Alba venue de nulle part, mais il manque lui-même le ballon sur une belle combinaison avec Griezmann. Surtout, il voit Ramos le priver d’un but sur la ligne. L’Argentin était seul, Griezmann ne brillant pas, et Suarez n’étant présent que sur la feuille de match. Peut-être est-on trop nostalgiques, mais quand on voit le niveau actuel du Real, on ne peut s’empêcher de penser que le Barça de Xavi et Iniesta se seraient amusés. Celui de 2019 n’amuse personne.
Après avoir vu le Barca défendre dans ses 30 mètres hier soir, et parfois laisser le ballon au Real, ça fait du bien de revoir la finale de 2011 et ce genre de pressing à la perte de balle, l’équipe qui reste haut et qui récupère la balle dans le camp de Manchester pic.twitter.com/lJhybXLo6w
— Fabien Chevallier (@fabchevallier) December 19, 2019
Le Real Madrid, au plus fort de sa domination en première période, s’est procuré beaucoup de situations de tir, mais aucune n’était véritablement dangereuse, mis à part celle repoussée par Piqué sur sa ligne, suite à un coup de pied arrêté. Les Madrilènes ont bien contrôlé l’entrejeu, grâce à un Valverde actif et un Casemiro de gala. Le Brésilien a dominé le milieu avec son activité, son agressivité dans les duels, mais aussi quelques gestes techniques bien sentis pour lancer les transitions, comme cette talonnade complètement folle en première période. Malheureusement, il manquait tout de même un peu de folie, et d’accompagnement pour Benzema. Le Français a bien aidé à faire le jeu en descendant un peu, voire en se baladant sur l’aile gauche… sans que personne n’ait la bonne idée de se projeter dans la surface quand il le faisait. Ronaldo le faisait avec brio, mais il n’est plus là. Pas besoin d’être aussi bon que le Portugais pour le faire, c’est juste un déplacement en fonction de celui de ton partenaire d’attaque, rien de sorcier. Loïc Rémy le faisait parfaitement, le peu de fois où il a été utilisé avec Benzema en équipe de France. Ce manque de présence a conduit la Maison Blanche à tirer de loin, ce qui n’a pas suffi. Marcelo a beaucoup manqué, sa créativité n’étant pas compensé par un Mendy volontaire en défense, mais bien trop maladroit balle aux pieds. On regrette aussi le match presque trop propre de Kroos, capable de passes plus tranchantes que ça. L’Allemand est à l’image de ce choc : on ne peut pas lui reprocher grand-chose, puisqu’il n’a pas spécialement raté de geste, mais il n’a pas pris le risque qui aurait pu débloquer les choses.
Le Real aurait dû gagner ce match, grosse performance du milieu de terrain, masterclass de Casemiro, Valverde j’en parle même pas beaucoup trop fort
— Brodie (@Steve_Oster1) December 18, 2019
Et sinon
- Pellegrini est une formidable raison pour regarder la Roma. L’Italien s’est bien amusé face à la Fiorentina, montrant quelque chose en plus sur ses prises de balle franches et sa vision du jeu.
- Auteur d’un doublé (dont un bijou) et une passe décisive face au Genoa, Lukaku est tellement un chic type qu’il laisse un penalty à Esposito, afin que son jeune partenaire inscrive son premier but avec l’Inter Milan. Remarqué pour ses bonnes entrées en jeu, notamment en Ligue des champions, l’Italien est très prometteur.
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- Si on peut se poser des questions sur la motivation de certains joueurs d’Aston Villa, notamment les défenseurs sur le second but d’Ings, on ne pourra pas reprocher grand-chose à Grealish. L’Anglais a encore été décisif, marquant un joli but face à Southampton.
- Serdar a mis un but qui lui ressemble face à Fribourg : en se jetant comme un mort de faim. Toujours bluffant dans l’intensité qu’il met dans ses courses, il est une des révélations de la première partie de saison. Par contre, ce serait bien pour lui et pour Schalke que ses partenaires concèdent moins de penalty.
- Privé par le poteau d’un bijou dans le temps réglementaire, Firmino fait preuve d’une lucidité incroyable pour offrir, en prolongations, la Coupe du monde des clubs à Liverpool, face à Flamengo. Le Brésilien profite aussi de l’altruisme incroyable de Mané, lui aussi stupéfiant de sang-froid sur l’action du but.
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- Même si son joli but n’a pas suffi pour vaincre Manchester City, on insiste comme toutes les semaines ou presque : Vardy forme un couple fabuleux avec Leicester. On a rarement vu une association aussi complémentaire entre une équipe et son numéro 9. L’Anglais n’est pas le plus complet, mais dans son registre, il est incroyable.
- Que Lingard rate un face-à-face contre Watford, c’est presque normal. Mais si les joueurs fiables s’y mettent aussi, comme De Gea qui se troue, ou Wan-Bissaka qui concède un penalty, Manchester United ne peut définitivement rien espérer.
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- Ce n’est même plus une surprise de voir l’Atalanta étriller l’AC Milan. Au moins, cela aura permis d’admirer encore une fois la technique si singulière d’Ilicic, auteur d’un doublé.
- On a déjà souligné son sang-froid dans la surface, et on continuera à le faire s’il met des buts comme ça. Face à Dijon, Diallo a marqué un magnifique but, couchant complètement Gomis sur sa feinte de frappe. Le maintien de Metz passera forcément par une seconde partie de saison aussi prolifique de son buteur.