Pour peu qu’une équipe domine un match, le gardien de but à souvent rien à faire, à part rester concentré dans le cas d’une contre-attaque. On a rencontré Darren Luke, qui a photographié leur solitude dans les petites divisions anglaises.
Prenez un cadre idyllique, ajoutez-y un terrain de football et un mec qui ressemble vaguement à un gardien de but, plutôt loin de sa zone à défendre. Vous avez tous les éléments pour une photo réussie.
Depuis que j’ai commencé, certains terrains ont disparu.
Darren, quand a commencé ton projet « Goalies » ?
Darren Luke – J’ai commencé à prendre des photos des petites divisions anglaises il y a 8 ou 9 ans. Je voulais me documenter sur les terrains et leur environnement, capturer la nature éphémère à travers les saisons. Depuis que j’ai commencé, certains terrains ont disparu.
J’aime l’idée d’une universalité des terrains de football. N’importe qui peut se retrouver parachuté sur un terrain et être familier avec le lieu et ses règles, peu importe le contexte dans lequel il se trouve. Je me souviens de vacances étant petit, à regarder par la fenêtre de la voiture pendant des heures, et à m’émerveiller quand j’apercevais un terrain de football à travers les arbres, surtout s’il y avait un match en cours. J’ai toujours cette émotion maintenant.
Quel est ton passé dans le football ?
Je jouais gardien de but quand j’étais à l’école, et mon livre préféré était sur un jeune gardien de but, « Goalkeepers are different » de Brian Glanville. C’est le poste le plus cool, le plus romantique, seul et stoïque. Le projet m’est donc venu naturellement car tous les gardiens se ressemblent, passant leur temps en restant debout, à regarder et à penser dans le vide, peu importe l’arrière-plan.
Je n’étais pas particulièrement bon à ce poste. Le plus haut niveau que j’ai atteint, c’était en jouant au poste de milieu galopant pour la 5e équipe de la BBC. Ma carrière s’est finie en me blessant au genou pendant un match avec une équipe de quartier, Wednesday Wednesday.
Régulièrement, les joueurs et le staff sont plus nombreux que les supporters. Des fois, on ne voit qu’un homme et son chien.
Qu’aimes-tu dans ce football amateur ?
J’aime cette culture unique. Les gens ne viennent pas pour l’argent, mais pour l’amour du jeu. Quand deux équipes de joueurs peu athlétiques s’affrontent dans la boue et sous la pluie pour cet amour, il est impossible de ne pas trouver ça romantique. Les responsables du club et les joueurs paient le prix d’un arbitre, les équipes ne sont pas tenues par des riches propriétaires mais des clubs avec une mission sociale. C’est un peu cliché mais il y a une approche authentique de l’esprit communautaire. Sur Internet, il y a peu de sites qui parlent de cette culture. Il y en a qui photographient les supporters ou la foule, d’autres sont fétichistes des pylônes ou des tribunes. Je ne photographie qu’un peu de pelouse et un paysage. Régulièrement, les joueurs et le staff sont plus nombreux que les supporters. Des fois, on ne voit qu’un homme et son chien.
Tout a déjà été dit sur le football de haut-niveau : il est industrialisé, ridiculement cher, alimenté et contrôlé par l’argent de la télévision. Même l’état d’esprit d’un « fan de football » est packagée. Dans les petites divisions, rien n’est médiatisé. Tu peux entendre les joueurs parler, sentir les tacles, parler au gardien s’il n’a rien d’autre à faire.
Tu as un autre projet en vue ?
J’aimerais bien suivre une équipe sur une saison complète. Et peut-être prendre plus de photos d’abribus.